vendredi 11 mai 2007

Alea jacta est

Finalement, j’ai écrit à mes parents pour leur dire que j’allais me faire opérer. J’ai besoin qu’ils le sachent, tous les deux. C’est trop essentiel comme étape dans ma vie. Passer cette opération sous silence revient à passer tout ce qui a changé en moi ces derniers mois sous silence. J’ai besoin qu’ils sachent qui je suis, qu’ils soient au courant de l’événement fondamental qu’est cette opération pour moi.

En plus, j’ai cette certitude curieuse que si je ne leur en parle pas AVANT l’opération, ce ne sera plus possible. J’ai la sensation qu’après, je n’en parlerai pas. Ca ressemblerait trop à un aveu et je n’ai rien à avouer. Je ne veux pas que ma reconstruction soit un secret que je leur dévoilerais un jour dans quelques années.

Et puis j’ai aussi eu envie de briser mon habitude de les tenir à distance, de me rapprocher un petit peu d’eux.

J’ai discuté avec mon homme et j’ai décidé de leur adresser une lettre à tous les deux. J’ai réfléchi toute la journée d’hier à ce que j’allais leur écrire. Pourtant, quand je m’y suis mise, hier soir, j’ai eu beaucoup de mal à la commencer, cette lettre.

J’ai tourné en rond pendant quelques heures, j’ai entamé plusieurs ébauches mais je les ai écartées les unes après les autres : j’avais la sensation de me justifier ou de chercher leur approbation, voire pire, de minimiser l’importance de cette opération pour moi.

Alors j’ai réfléchi à ce que je voulais leur dire au fond, dans ma lettre, à savoir que je les aimais. Et là, c’est venu tout seul et j’ai écrit ma lettre d’une traite, sans la moindre difficulté.

Je suis franchement contente de ce que j’ai écrit. En fait, j’ai adressé, peut-être pour la première fois, une lettre d’adulte à mes parents.

Je l’ai recopiée deux fois. Je voulais certes adresser mes mots à mes deux parents en même temps, mais je voulais que chacun en reçoive un exemplaire.

Ce matin, très tôt, avant d'aller travailler, j'ai posté mes lettres. Normalement, elles arriveront avant le 16 Mai.

Sur le coup, je me suis sentie heureuse, libérée. « Cette fois, j’ai fini mes préparatifs » ai-je même songé.

Mais depuis, j’ai peur de la réaction de mon père. C’est absurde, je sais, mais je ne peux m’empêcher de penser qu’il va être terriblement en colère contre moi. Quant à ma mère, je pense qu’elle n’en parlera pas. Mais au fond, peu m'importe sa réaction, là, ce soir.

Malgré ma peur, je n’ai aucun regret. Les lettres sont postées et le sort en est jeté.



17 commentaires:

Franck a dit…

Une bise sur chaque joue, une par chaque lettre \o/

Anonyme a dit…

Le courage ce n'est pas de ne pas avoir peur, c'est de la surmonter. Comme je te l'ai déjà dit, je te trouve très courageuse. Bravo pour tes lettres !

Unknown a dit…

pourquoi penses-tu que ton père pourrait etre en colère après toi ?
En tout cas, je trouve ta démarche très courageuse, surtout qu'apparemment tu en avais vraiment besoin vu le bien que ça t'a fait. Je suis heureuse pour toi :-)
Bisous

Anonyme a dit…

Bravo à toi ;o)
tu y gagnes deux personnes de plus qui penseront à toi le jour J

"En mai, fais ce qu'il te plaît"

Super musclé, le papillon, au fait... une espèce à admirer ;o)

Anonyme a dit…

BRAVO !
Un bel acte adulte, courageux et plein d'amour.
Je me pose la même question que Mlle Crapaud.

Bises à toi.

papillon a dit…

Merci Franck, Kozlika, mlle Crapaud, Lili et Nounsse :)

Kozlika, c'est vrai que je suis très fière de ne pas m'être arrêtée à ma peur, d'avoir répondu à mon besoin de leur dire et d'avoir écrit mes lettres. Maintenant, je me sens comme en paix avec moi-même, quoi qu'il arrive. Mon besoin a été comblé...

Mlle Crapaud et Nounsse, c'est le fait d'envoyer une lettre et de ne pas leur dire en face qui pourrait déclencher la colère de mon père, il pourrait trouver que c'est lâche de ma part. Et puis je ne leur donne pas voix au chapitre ce faisant, je les informe, point. et il pourrait mal prendre le fait que je ne lui ai justement pas demander ni son avis ni sa permission. Ca pourrait aussi le renvoyer à son impuissance à me protéger ou il pourrait vivre cette lettre comme une critique voilée d'eux, une accusation ou je ne sais pas trop quoi d'autre. Mille possibilités de réactions me viennent en tête et toutes sont de cet acabit: colère de mon père, silence de ma mère.
J'appréhende un peu la prochaine fois qu'on se parlera au téléphone. Je crois que ça va être difficile, avec cette lettre en arrière-plan. Et là, je ne peux qu'attendre. Je ne me vois pas l'appeler pour une conversation superficielle, l'air de rien, ni pour lui demander "Alors, vous avez reçu ma lettre? Vous en dites quoi?". Il va falloir que j'attende qu'il se manifeste...

Lili, ça me plairait beaucoup qu'ils pensent à moi le 16 Mai prochain, mais honnêtement, s'ils ne le font pas, ce ne sera pas bien grave.

En vous répondant, là, je commence à m'interroger sur le fait que je me fous de la réaction de ma mère et que je n'ai pensé qu'à celle de mon père. Il va falloir que je m'interroge...

Unknown a dit…

C'est peut-être lié justement à ton excision : c'était une décision de ta mère, que ton père réprouvait. Peut-être que, malgré tout, tu es plus "proche" de lui, que son avis t'importe davantage en tout cas...

papillon a dit…

Ah oui, c'est bien possible Mlle Crapaud. Peut-être qu'en me demandant comment mon père va réagir, je me demande en fait s'il est "resté" contre notre excision ou s'il s'est finalement rangé à l'avis de ma mère au fil des années...

Anonyme a dit…

Papillon,
Si ça ne te pose pas de souci, j'aimerais échanger mon adresse MSN avec toi....

Anonyme a dit…

Tu as bien fait d'écrire à tes parents papillon.
N'appréhendes pas la réaction de ton père, je pense qu'il sera soulagé, meme s'il ne te le dit pas...
Je penserais énormément à toi le 16 Mai
Laety...

papillon a dit…

Meric beaucoup Laety. Moi ça m'a fait du bien d'écrire cette lettre. Si mon père s'en trouve soulagé, c'est tant mieux. Tu sais, lorsque j'ai parlé des circonstances dans lesquelles mon excision s'est déroulée à mon meilleur ami, il m'a dit qu'il avait beaucoup de peine pour mon père, "emmuré avec ses sentiments sur sa question". Je me plais à penser maintenant que j'ouvre une porte qu'il ne pouvait pas forcément ouvrir lui-même...

Chère Anonyme, qui es-tu donc? Ma méfiance viscérale me pousse à vouloir le savoir avant de te communiquer mon adresse.

A bientôt peut-être?

Anonyme a dit…

Pour avoir lu ce que tu dis de ton père jusqu'ici, je serais tentée de penser qu'au contraire il va être très heureux, et très fier de toi. Il a l'air de beaucoup tenir à ce que ses filles soient des femmes libres et fortes, et ta démarche va dans ce sens.
Bravo Papillon, en tout cas, je suis très admirative de ta façon de vivre et de dire les choses !

papillon a dit…

Merci beaucoup Hélène!
J'espère que tu auras raison et que mon père sera heureux pour moi. Mon incapacité à en être certaine vient de ce que, même s'il veut que nous soyons libres, je ne suis pas sûre que mon père soit prêt à me voir vivre ma vie comme je l'entends, sans avoir son mot à dire.
Et là, je me dis qu'en fait, cette lettre, c'est une façon pour mes parents de mieux me connaître mais aussi pour moi de mieux les connaître au travers de leur réaction ou absence de réaction...

Anonyme a dit…

Je ne suis pas "anonyme", je suis coucoune et j'ai oublié de saisir mon pseudo avant d'envoyer mon commentaire.
Je comprends ta méfiance et j'aurais sans doute réagi de la même façon.
Je me fais opérer le 06 juin par le DR FOLDES et je souhaitais simplement partager mes angoisses avec une personne qui vit quelque chose de similaire.
J'ai donné mon adresse e-mail à Hélène pour qu'elle te transmette.
Bon courage pour mercredi.

papillon a dit…

C'était donc toi Coucoune!
Hélène va nous mettre en relation (merci d'ailleurs Hélène!). On va pouvoir discuter.
Merci pour mercredi et bon courage à toi. Tu verras, 3 semaines, ça passe très vite!

Anonyme a dit…

Papillon, je viens de rentrer ce soir, et ma première visite est pour toi. Bravo, c'est génial d'avoir écrit à tes parents.
Je suis impatiente de lire la suite. Bises
Claude

papillon a dit…

Coucou et merci Claude! Je suis contente de te revoir!