Ma cousine et mon meilleur ami m’ont demandé si j’allais parler de mon opération à mes parents. Pour le moment, ce n’est pas à l’ordre du jour pour moi. Je ne crois pas que je vais leur en parler avant l’opération. Je n’en ai pas envie et je n’en ai pas la force. Je ne sais même pas si un jour j’aborderai le sujet avec eux ni sous quel angle.
Lorsque j’ai pris la décision de me faire opérer, j’ai eu très envie d’en parler à ma mère. Un jour, sur une impulsion, je l’ai même appelée dans ce but. Mais je n’ai finalement pas abordé le sujet. Je ne savais pas quoi lui dire exactement. Je ne veux pas vraiment lui demander des comptes. Que pourrait-elle me dire qui me fasse du bien ? Qu’elle l’a fait pour moi, pour que je trouve un mari ? Qu’elle l’a fait pour être acceptée par sa belle-mère ? Que c’est comme ça dans notre culture ?
Elle est très attachée au « qu’en dira t’on » et elle s’accroche aux traditions tant qu’elle peut.
Je me fiche de ses raisons, au fond. La question du pourquoi ne m’intéresse pas. Je préfèrerais qu’elle me raconte ce qui s’est passé, ce dont je ne me souviens pas. J’aimerais aussi qu’elle me parle d’elle en tant que femme. Qu’elle m’explique ce qu’a été sa vie, ses rêves, ses espoirs. Ce qu’elle a ressenti en se mariant, en ayant des enfants. Je ne connais pas beaucoup ma mère. Je me demande par exemple si ma mère a été excisée… Et je réalise que je n’ai aucune certitude. Je pense que oui, mais au fond, je n’en sais rien. Elle parle très peu d’elle-même. Elle parle très peu de choses intimes d’ailleurs. C’est si difficile de lui parler. Quand un sujet la met mal à l’aise, elle se ferme, ne parle plus et quitte la pièce. Elle ne revient jamais dessus. Quelques minutes plus tard, elle vient me voir à propos de tout autre chose, comme si de rien n’était. Elle est au courant que je suis en thérapie mais elle ne m’en parle jamais. Comment pourrais-je partager ce que j’éprouve en ce moment avec elle ?
Je lui en veux de n’avoir rien espéré de mieux pour moi, de n’avoir pas cherché à me soustraire à une pratique qui l’a fait souffrir elle-même, de s’être contentée de suivre la tradition. Je me demande comment elle m’aime au juste (parce qu’elle dit m’aimer, elle dit que je suis sa fille préférée). Je ne comprends pas. Et pourtant, je n’arrive pas à ressentir de la colère contre elle. Juste beaucoup de tristesse pour moi.
Je manque cruellement d’éléments de féminité venant de ma mère. La féminité de ma mère, je ne l’ai jamais perçue. Je ne l’ai jamais vu séduisante ou enjôleuse avec mon père. Ma mère me semble être une épouse et une mère avant d’être une femme.
Comment puis-je alors me construire une féminité si je ne peux m’appuyer sur son exemple ? Encore quelque chose que j’essaie d’apprendre toute seule.
Et c’est ce genre de chose qui me décourage. Apprendre toute seule, naviguer dans ma vie sans l’appui de ma mère.
Je voudrais qu’elle vienne vers moi, qu’elle s’intéresse à moi sans prendre tout ce qui nous différencie comme une critique de ce qu’elle est. Je voudrais qu’elle m’épaule, qu’elle m’encourage, qu’elle soit là pour moi. Sans que je le lui demande. Je suis fatiguée de lui faire signe. Je suis fatiguée et je me sens isolée.
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7 commentaires:
Qui n'en veut pas à sa mère ? Tu vois, j'ai 62 ans et je lui en ai voulu de tant de choses. Parfois encore, il m'arrive de lui en vouloir pour telle ou telle chose. Mais je me dis aussi que, compte tenu du genre de personne qu'elle était, de l'éducation qu'elle avait reçue, et de la vie qu'elle a eue, elle a fait comme elle a pu.
Tu es jeune et tu peux, toi, aller de l'avant. Elle est d'une autre génération et a sans doute pensé qu'elle faisait de son mieux. Ce qui est important, c'est que toi, tu aies pris ta vie en main et que tu aies décidé de faire autrement.
Tu as raison Claude. Je ne veux pas consacrer ma vie à en vouloir à ma mère. Je préfère tracer ma route personnelle, une route qui me corresponde et sur laquelle je me sente bien. Ce n'est pas facile et parfois, je me dis que j'aurais aimé que ma mère ait commencé à la tracer pour moi, cette route...
Je te remercie beaucoup pour ton soutien Claude. Il me fait beaucoup de bien.
Bonjour,
On ne se connait pas mais j'ai découvert ton aventure sur le blog "Vieux c'est mieux".
Tu n'es pas seule, tu t'as "toi" déjà, avec ton courage et ta force.
S'avoir soi-même, c'est énorme. Tu es ta meilleure alliée, ta meilleure amie, ton plus fidèle soutien.
Regarde vers le présent, vers demain.
Hier importe peu, c'est fait. Tu n'y peux + rien, ni personne.
Par contre, pour aujourd'hui et demain, tu peux tout si tu le souhaites.
Ce qui semble être le cas.
Plus que 9 jours jeune femme !!! :)
Amicalement
Cath
Bonjour Cath! Merci de ton si joli message qui fait chaud au coeur. Malheureusement, c'est le 16 Mai, l'opération. Je dois donc attendre encore un peu mais ce n'est pas plus mal, ça me donne du temps pour m'habituer mentalement à ce que j'ai fait pour moi en entreprenant cette démarche, à l'importance de ces pas. Pour comprendre pleinement que quoi qu'il arrive, je "m'ai moi" comme tu dis.
Coucou!
Je m' appelle Amy et je viens de lire ton "histoire". La premiére chose qui me vient à l' esprit, c' est que j' ai l' impression que c' est mon histoire qu'on raconte à quelques détails prés. Et la premiére réponse qui me vient à l' esprit c' est comme le dit cath, tu n'y peux plus rien. Nos méres, avec leur vécu, leur éducation. Elles n' ont pas appris à communiquer avec leur filles, même si j' avais une trés grande complicité avec ma mére. Elles sont comme ça; alors en sachant cela, ne prend que les bons côtés. A force tu te mines le moral. Garde ton énergie pour ton opération et pour ton avenir. D' en parler, c' est déjà un grand pas.
Je suis de tout coeur avec toi.
Bonjour et merci beaucoup pour tes encouragements Amy. Je sais que tu as raison et qu'il est totalement illusoire de croire que ma mère va changer. Je ne l'espère pas. Mais de temps en temps, j'avoue éprouver des regrets que ça n'arrive pas. Je vais m'appliquer à consacrer mon énergie à mon avenir, comme tu me le suggères. Dis-moi Amy, t'es-tu fait opérer?
Keep up the good work.
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